Le mal du pays, ou « le petit coup de mou »

Les premières semaines ici étaient vraiment magiques. Je voulais sortir, découvrir, je me sentais tellement légère, sans aucune contraintes. Seulement, au fil des semaines, je me rends compte que l’enseignement n’est vraiment pas ma passion. Les enfants sont mignons, ils sont actifs quand le sujet les intéresse, c’est à dire une fois sur 5. C’est vraiment difficile de trouver des sujets captivants, qui plairont à tous.

Donc, j’ai commencé à me réveiller le matin en me disant: « Oh non… » puis peu à peu j’ai perdu mon enthousiasme. Je parle moins, je ris moins. Puis je suis allée faire mon premier tatouage. Et là, deux jours plus tard, les doutes sont arrivés.

« Est-ce que j’ai bien fait? » « Est-ce qu’il est joli? » « Il y a quelques défauts par rapport au dessin original… » « Est-ce que je vais l’aimer toute ma vie? »

Pourtant cela fait 3 ans maintenant que je rêve de me faire tatouer. Et un petit chat, dans le style encre de chine, ça me paraissait original et le chat a beaucoup de significations pour moi. Beaucoup me disent qu’il est vraiment joli, délicat, simple, artistique, qu’il me correspond (oui tout le monde connaît mon amour démesuré pour les chats). Et c’est vrai qu’il est joli. Mais c’est à ce moment qu’entrent en jeu mes « crises d’angoisses ». Cela fait maintenant 5 ans que j’en ai, au moins une fois par année. Et dés que je ne me sens pas bien, incertaine, il suffit d’un élément déclencheur (ici, le tatouage) et je tombe dans une crise de panique perpétuelle. J’ai la gorge serrée, la tête qui bourdonne, les mains qui tremblent, des questions qui tournent sans arrêt dans ma tête. Le pire, c’est de dormir, car je sais qu’au réveil mes angoisses vont recommencer et que je vais me réveiller avec le coeur qui bat trop vite et un stress que je n’arrive pas à gérer.

Alors pour me rassurer, je me dis: « Au pire, je peux toujours le faire enlever, ce tatouage… ». Et oui, je peux. Mais pas avant de partir en Afrique du Sud, car je n’ai que deux semaines en Suisse. Alors ma tête me dit: « Ce tatouage a déclenché tes crises au Vietnam, peut-être qu’il les déclenchera aussi en Afrique. » Oui, je sais, c’est compliqué.

J’ai l’impression de traverser un tunnel sans fin. Je me souviens des premières semaines ici, pendant lesquelles j’ai ressenti un tel bonheur et un tel soulagement, et maintenant, c’est l’opposé. Je me sens oppressée et je ne sais pas comment faire pour me calmer. Je ne trouve de réconfort nulle-part, même dormir ne me soulage pas.

Comment faire pour retrouver l’état dans lequel j’étais au départ? Juste respirer, et attendre que la crise ne passe? Mais c’est tellement fatiguant… Je m’en veux d’être aussi sensible. Je m’en veux d’avoir des angoisses ici, au Vietnam. Je me sens… démunie. Déprimée.

Le pire, c’est que demain, c’est mon anniversaire. Mon 20ème anniversaire, et je vais le fêter ici, au Vietnam. Et je ne me sentirai pas bien. Alors là, ma tête me dit: « C’est à cause du tatouage.. » et « tu devrais le regretter… ». C’est un cercle vicieux dont je n’ai pas encore trouvé la sortie. Et cette fois, je ne suis pas à la maison, je n’ai pas mes repères, je ne trouve rien pour me calmer. Je passe mon temps à comparer l’image originale et mon tatouage, même si cela ne changera rien, et même si cela le rend plus unique. Quand je regarderai ce tatouage dans 10 ans, je penserai à ce voyage, mais aussi à d’autres souvenirs qui sont précieux pour moi. C’est comme cela que je devrais penser.

Voilà, écrire ce texte me serre la gorge et me fait monter les larmes aux yeux, mais ce voyage n’est pas que bonheur et découverte, comme je l’aurai pensé, comme je l’aurai voulu.

 

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